
Alors qu’un débat fait actuellement rage sur les réseaux sociaux, à propos de la «gabonitude» ou non des Haoussa du Gabon, News-live se propose de revenir sur les conditions d’acquisition de la nationalité gabonaise, à travers les éclairages du Pr Charles Mba-Owono, agrégé des Facultés de Droit, avocat au Barreau du Gabon, par ailleurs Doyen honoraire de la Faculté de droit et des sciences économiques de l’Université Omar Bongo (UOB). Des propos issus d’une interview accordée à l’AGP, au lendemain de l’annonce, par le président de la Transition, de la révision des conditions d’attribution de la nationalité gabonaise.
« (…) Il convient de rappeler, de prime abord, qu’il existe un Code de la nationalité gabonaise datant du 20 juillet 1999, et qui s’est lui-même substitué au premier code adopté au lendemain de l’indépendance, notamment en 1962. A cet égard, une distinction technique est faite entre l’attribution de la nationalité gabonaise à titre nationalité d’origine, et son acquisition postérieure à la naissance, par un individu né non gabonais.
I-Gabonais d’origine
En ce qui concerne l’attribution de la nationalité gabonaise à titre de nationalité d’origine, laquelle se caractérise par le fait qu’un individu est reconnu gabonais dès sa naissance, le système issu du code de la nationalité gabonaise combine le droit du sang et le droit du sol.
C’est ainsi que, sur le fondement du droit du sang, la nationalité gabonaise est attribuée à titre de nationalité d’origine à tout enfant légitime ou naturel dont la filiation est établie à l’égard d’au moins un de ses parents de nationalité gabonaise. Le législateur ne formule du reste aucune exigence au sujet du lieu de naissance. Ce qui signifie que l’enfant issu d’au moins un parent gabonais bénéficie de droit de la nationalité gabonaise, quel que soit son lieu de naissance.
Sur le fondement du droit du sol, la nationalité gabonaise est attribuée à titre de nationalité d’origine aux enfants légitimes ou naturels nés au Gabon de parents étrangers, lorsqu’au moins l’un d’eux y est né lui-même. Ce qui revient à dire que sont gabonais de droit, les petits-enfants des étrangers installés au Gabon. Bénéficient également de la nationalité gabonaise en raison de leur naissance au Gabon, l’enfant né au Gabon de parents inconnus ou apatrides, et l’enfant nouveau-né trouvé au Gabon. Toutefois, dans ces derniers deux cas, cette nationalité a en réalité un caractère provisoire, dans la mesure où elle se perd si un lien de filiation est ultérieurement établi à l’égard de parents étrangers.
En dehors de la prise en compte de la filiation et de la naissance au Gabon, l’attribution de la nationalité à titre de nationalité d’origine peut également intervenir par voie de reconnaissance. Dans ce cas, l’attribution de la nationalité doit être volontairement sollicitée. Ce qui fait la différence avec les deux premières hypothèses dans lesquelles la nationalité est attribuée de plein droit à l’enfant dès sa naissance. Peuvent bénéficier de cette possibilité, en satisfaisant bien entendu à certaines conditions de fond et de forme, les enfants nés au Gabon de parents étrangers, les personnes nées dans une localité d’un Etat frontalier au Gabon, et les personnes recueillies au Gabon avant l’âge de quinze ans. Cette acquisition de la nationalité, bien qu’intervenant après la naissance, confère bien la nationalité d’origine et produit par conséquent, en quelque sorte, un effet rétroactif.
II-Gabonais d’adoption
S’agissant maintenant de l’acquisition de la nationalité gabonaise par un individu postérieurement à sa naissance, le Code de la nationalité prévoit quatre possibilités pour un étranger de devenir gabonais, à savoir : le mariage, l’adoption, la naturalisation et la réintégration.
Le mariage avec un gabonais peut effectivement permettre à un étranger d’acquérir la nationalité gabonaise. Toutefois, la personne de nationalité étrangère mariée à un gabonais doit volontairement entreprendre une démarche dans ce sens, en formulant une demande expresse. Le législateur exige en outre, qu’un délai de trois ans se soit écoulé depuis la célébration du mariage, et que celui-ci n’ait pas été dissout entre temps.
L’adoption, qui crée un lien de filiation entre deux personnes qui ne sont pas parents par le sang, a également une incidence sur la nationalité. La règle est en effet que l’enfant mineur adopté acquiert cette nationalité à compter de la décision prononçant l’adoption. Toutefois, pour faire reconnaître cette nationalité, une déclaration doit être adressée à la juridiction compétente qui statue par un jugement motivé.
On parle par contre de naturalisation lorsque l’autorité publique octroie la nationalité gabonaise à un étranger qui en a fait la demande. Cette décision est de la compétence exclusive du chef de l’Etat, qui la prend par décret. Bien entendu, au-delà des questions de forme et de procédure, la naturalisation exige que celui qui la sollicite remplisse certaines conditions, notamment de bonne moralité et d’attachement au Gabon.
La réintégration consiste enfin, pour une personne ayant perdu la nationalité gabonaise qu’elle a eu à porter auparavant, à demander de la recouvrer. Comme la naturalisation, elle est accordée par un décret du Chef de l’Etat.