Génocide Rwandais : clôture des investigations contre Agathe Habyarimana sans mise en examen

Les investigations ouvertes en France contre Agathe Habyarimana, veuve de l’ancien président rwandais, Juvénal Habyarimana, pour son éventuel rôle dans le génocide des Tutsi au Rwanda en 1994, ont été closes sans qu’aucune mise en examen ne soit prononcée à son encontre. Une décision rendue récemment par la juge d’instruction du pôle crimes contre l’humanité du tribunal judiciaire de Paris, qui considère que les charges ne sont pas suffisamment étayées.

Agathe Habyarimana, 82 ans, était placée, depuis 2016, sous le statut de témoin assisté, un statut intermédiaire qui n’implique ni innocence ni culpabilité, mais qui l’expose à une possible mise en examen. Après des années d’enquête, la juge en charge du dossier, en co-saisine avec une collègue spécialisée, estime désormais qu’: « il n’existe pas, à ce stade, d’indices graves et concordants permettant d’imputer à Mme Habyarimana une complicité dans les crimes commis en 1994 ». Les magistrates pointent des témoignages « contradictoires, incohérents voire mensongers » et soulignent qu’: « aucune preuve concrète ne relie l’intéressée à des actes de propagande ou de planification du génocide ».

Cette décision marque ainsi un tournant dans une procédure entamée, en 2008, après une plainte déposée par le Collectif des parties civiles pour le Rwanda (CPCR), qui voyait en Agathe Habyarimana l’une des figures centrales de l’« akazu », le cercle de proches accusés d’avoir orchestré les massacres. Les juges, elles, la décrivent plutôt comme « victime de l’attentat terroriste » du 6 avril 1994, qui coûta la vie à son mari et déclencha les tueries de masse.

Son avocat, Me Philippe Meilhac, s’est félicité de cette évolution : « Mme Habyarimana attend avec une grande sérénité l’issue de la procédure. Il est temps que le non-lieu qui s’impose soit prononcé au plus vite ». Il dénonce également une enquête longue et éprouvante, entachée selon lui de motivations politiques.

Mais l’affaire n’est pas tout à fait close. Le Parquet national antiterroriste (Pnat) a contesté cette décision et saisi la chambre de l’instruction de la Cour d’appel de Paris pour obtenir une mise en examen pour entente en vue de commettre un génocide. Une audience à huis clos est prévue ce mercredi 21 mai. Du côté des parties civiles, la déception est palpable. Patrick Baudouin, avocat de la FIDH, regrette une « absence de mise en examen alors qu’il existe des éléments à charge largement suffisants ».

Installée en France depuis son exfiltration en avril 1994, par les autorités françaises, Agathe Habyarimana vit toujours sur le territoire sans statut légal, la France ayant refusé son extradition vers le Rwanda tout en lui déniant l’asile.

Alors que le génocide des Tutsi a causé la mort de plus de 800 000 personnes, cette affaire met une nouvelle fois en lumière les difficultés persistantes de la justice française à traiter les dossiers liés à cette tragédie historique.

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