
Arrêté par la DGR, puis jeté en prison par le parquet de la République alors qu’il avait échappé à la mort lors d’une attaque à l’arme à feu, le nommé Barry est enfin sorti du pénitencier de Libreville.
C’est une décision qui confirme, s’il en était encore besoin, que plusieurs personnes séjournent souvent de manière injuste derrière les barreaux. Soit parce que les enquêtes préliminaires ont été bâclées, soit parce le parquet de la République a fait preuve de légèreté dans le traitement judiciaire d’une affaire.
Et là, après un an et quatre mois de détention préventive à la prison centrale de Gros-Bouquet, un prisonnier vient de bénéficier d’un non-lieu. Il se nomme Barry. Les faits remontent au vendredi 19 août 2022. L’on a souvenance que ce jour-là, la ville de Kango avait été le théâtre d’un drame digne d’un film du Far-West.
Il s’était agi d’un braquage à main armée ayant occasionné deux morts et un blessé. Le nommé Barry et son collègue Kader, tous deux conducteurs de camion au sein de la société ITG, étaient partis de Libreville en début d’après-midi en direction de Ndjolé où ils devaient livrer du carburant. Arrivés à Kango peu avant la tombée de la nuit, Kader propose qu’ils dorment chez son ami Ballo. Une proposition acceptée par son compagnon de route.
Mais pendant qu’ils partageaient un repas vers 20 heures, un individu en cagoule et armé fait irruption dans la maison. Sans perdre de temps, il commence à tirer sur les personnes se trouvant devant lui. Malheureusement, Kader et Ballo perdront la vie. Quant à Barry, il réussira à s’enfuir avec une balle à la cuisse.
Alors qu’il était en train de suivre les soins dans un hôpital de Libreville, il est interpellé par des éléments de la Direction générale des recherches (DGR), puis conduit dans les locaux de cette unité spécialisée de la gendarmerie nationale. Trois jours plus tard, il est emmené à la brigade de Kango-centre.
Présenté devant le procureur de la République, le 31 août 2022, le miraculé Barry est étonnamment placé sous mandat de dépôt pour « homicide volontaire ». Le maître des poursuites avait-il conclu qu’il s’agissait d’un coup monté ? Personne pour répondre.
Toujours est-il que de l’enquête préliminaire à l’instruction devant le magistrat instructeur, Barry ne reconnaît pas les faits qui lui sont reprochés. Restant constant tout au long de la procédure.
En 2023, plus exactement le 14 juin, le juge d’instruction rend une ordonnance de non-lieu contrairement aux réquisitions du Ministère public. Mais, sans grande surprise, le parquet interjette appel.
De juin à décembre 2023, la Chambre d’accusation n’a apparemment pas eu le temps d’examiner cet appel. Le détenu préventif a dû contacter les organisations de défense des droits des prisonniers pour une intervention sur son dossier.
Ces organisations se sont donc rendues auprès du cabinet d’instruction, qui va les informer que « le dossier est déjà au niveau de la Cour d’appel judiciaire de Libreville ». « Constatant que le dossier de Barry n’avait pas encore été examiné, le 10 janvier dernier, nous avons saisi le premier président de la Cour d’appel », assure Lionel Engonga, le président de SOS Prisonniers.
Le 2 février 2024, la Chambre d’accusation a déclaré l’appel du procureur irrecevable. Peut-être a-t-il estimé que cet appel avait été fait le 20 juin 2023, alors que le cabinet d’instruction avait notifié l’ordonnance de non-lieu le 14 juin. Et, conformément aux dispositions des articles 168 et 171 du Code de procédure pénale, l’appel doit être formé dans les 48 heures de la notification.
Après la décision de la Chambre d’accusation, l’Ong citée précédemment s’est rendue au Greffe où elle a procédé au règlement de la somme de 30 000 FCFA représentant les frais de l’arrêt de la Chambre d’accusation. Et c’est finalement le 6 mars courant que Barry a été libéré, alors que la décision de la Chambre d’accusation a été rendue le 2 du mois dernier. Il aura passé 16 mois de prison pour rien.
Qui va réparer le préjudice subi ? S’il est vrai qu’il a le droit de porter plainte à l’État pour cela, pourra-t-il assumer financièrement toutes ces procédures ? Aussi, sommes-nous en droit de demander si les enquêtes ont été vraiment poussées et qui a finalement assassiné Kader et Ballo, ou qui a blessé Barry.