Le premier ministre, Raymond Ndong Sima, a tenu une rencontre hier avec les principaux cadres de l’administration publique gabonaise. Cette réunion, qui s’est déroulée à l’immeuble Arambo, faisait suite aux remontrances du chef de l’État, Brice Clotaire Oligui Nguema, sur les dérives observées dans la gestion des affaires publiques. À travers cette initiative, le gouvernement affiche une ferme volonté de redresser l’administration gabonaise en imposant des mécanismes de contrôle et d’évaluation de ses agents. Mais cette ambition peut-elle réellement se concrétiser ?
Une volonté affichée de réforme
Il est indéniable que la démarche du premier ministre traduit une volonté de rompre avec certaines pratiques qui ont longtemps gangrené l’administration gabonaise. En dénonçant les détournements de fonds et les rétrocommissions, le chef de l’État a mis en lumière des dysfonctionnements récurrents qui nuisent à la qualité du service public.
L’instauration d’un système de notation des agents publics et l’exigence de rapports d’audits réguliers apparaissent comme des mesures destinées à renforcer la transparence et la reddition des comptes. En imposant un délai de 60 jours pour la mise en place de ces dispositifs, le gouvernement tente d’accélérer la modernisation de l’administration et de responsabiliser les hauts fonctionnaires.
L’idée selon laquelle « celui qui paie a le droit d’évaluer celui qu’il paie » souligne une logique de performance qui pourrait améliorer l’efficacité des services publics. Si ce principe est appliqué de manière rigoureuse et objective, il pourrait permettre de distinguer les agents compétents de ceux qui profitent du système sans réelle productivité.
Des défis et limites à surmonter
Cependant, plusieurs interrogations subsistent quant à la mise en œuvre effective de ces réformes. D’abord, la question des moyens : l’administration gabonaise dispose-t-elle des outils et des ressources nécessaires pour établir un système de notation fiable et objectif ? La corruption et les jeux d’influence internes ne risquent-ils pas de fausser ces évaluations ?
Ensuite, la menace de sanctions brandie par le premier ministre peut être perçue comme un moyen d’imposer un changement rapide, mais elle pourrait aussi générer des résistances. Les fonctionnaires concernés, habitués à un certain laxisme, pourraient voir ces nouvelles exigences comme une attaque contre leurs acquis, d’où un risque de blocage ou d’application partielle des mesures.
Par ailleurs, la comparaison faite entre les administrations civile et militaire mérite réflexion. Si les militaires ont des critères d’évaluation stricts, leur mode de fonctionnement repose sur une hiérarchie rigide et une discipline spécifique. Peut-on transposer ce modèle à l’administration civile sans prendre en compte les différences structurelles et organisationnelles ?
Enfin, l’indignation exprimée face à l’intervention des institutions financières internationales (Banque mondiale, BAD, FMI) dans la gestion publique traduit une aspiration à l’autonomie. Cependant, il est important de reconnaître que ces organismes ne se contentent pas de donner des leçons ; ils apportent aussi une expertise et des financements qui restent essentiels pour un pays en quête de redressement économique.
Toutefois, il faut comprendre que l’initiative du gouvernement témoigne d’un engagement clair en faveur d’une administration plus efficace et intègre.